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RAILLOT Marcel

Marcel Georges Eugène Clément RAILLOT, coiffeur, né à Heugleville-sur-Scie (Seine-Inf.), chez sa grand-mère maternelle, le 22 juillet 1913, fils de 

Georges Gustave, employé aux tramways, et de Marguerite Eugénie CAPRON, demeurant à sa naissance 123 rue de Sotteville à Petit-Quevilly (Seine-Inf.)

 

Marié à Monville le 9 septembre 1933 avec Rolande Raymonde AVISSE, cuisinière, née à Monville le 8 mai 1913 et décédée à Criquetot-sur-Ouville (76) le 27 mars 2003 à la résidence des pommiers.. 

 

Affecté au 39è Régiment d'Infanterie à Rouen le 20 octobre 1934

Renvoyé dans ses foyers le 12 octobre 1935

 

Mobilisé le 5 septembre 1939 au 74è régiment d'infanterie à Rouen

Tué par éclat d'obus le 9 juin 1940 à Sommauthe (Ardennes), à l'âge de 27 ans.

 

MORT POUR LA FRANCE

 

Transcription du décès à Monville le 9 mai 1942

Bois de Sommauthe – Oches – Mont Damion / 6° DI

La 6ème Division d’Infanterie verrouille la ligne Oches - La Polka-Bois du Four

Du 14 au 25 mai, après de multiples attaques, l’engagement de troupes nombreuses et une concentration d’artillerie nulle part aussi dense, l’ennemi a finalement traversé la zone boisée la moins large et la plus morcelée, des Grandes Armoises à La Berlière. En relève de la 3° DIM, deux divisions sont chargées de la défense de la ligne Sommauthe-Le Chesne : la 35° DI pour l’espace Le Chesne -Oches (exclu) et la 6° DI pour le secteur Oches-Bois du Four. La 6° DI qui sort de l’enfer d’Inor, va prendre en charge la défense de la ligne Bois de Sy au Bois du Four en passant par Oches, les fermes de la Polka et d’Isly et la forêt de Sommauthe.

Cette relève ne se fait pas dans les meilleures conditions : la 6° DI sort de combats difficiles et meurtriers en forêt d’Inor ; elle rejoint ses nouvelles positions une partie en camions, le reste à pied (40 km pour le II/36) ; comme les véhicules sont très en retard et redoutent de jour les Stuka, ils déchargent les hommes à 15 km (près de Germont), sans leurs armes lourdes qui doivent suivre. Ce sont donc des hommes épuisés par la marche, par la chaleur (ils portent la capote sous le soleil !), fatigués par le poids de leurs armes, des munitions, de leur paquetage, qui prendront place.

Le 119° RI arrive le 25 vers 22 h et relève le 43° RIC au Nord du Bois du Four.
Le 74° RI relève le 5° RICMS au cours de la nuit du 24 au 25 dans le secteur Isly-carrefour de Beaumont au Nord de Sommauthe.
Le 36° RI arrive dans la nuit du 25 au 26 et relève le 5° RICMS (sauf le II° bataillon qui se déplace le 24 en plein jour pour être engagé à Tannay). Il est chargé de la défense de Oches. Son voisin, le 123° RI de la 35° DI arrive progressivement, d’abord le II° Bataillon, puis le Ier vers 8 h.
Le 223° RAC de la 6° DIC, resté sur place, (15° batterie et le 5° Groupe) et l’artillerie de Corps d’Armée renforcent les unités de la division. L’ensemble représente 170 pièces, mortiers, antichars et DCA non comptés : une force de frappe exceptionnelle !
Ces mouvements se font sous les tirs permanents de l’artillerie ennemie. Un éclat blesse mortellement le colonel de Saint Vincent commandant le 13° GRDI au Bois du Four. Un obus arrive en plein sur le PC de la 15° Batterie du 225° RAC à Sommauthe qui, de nuit, se déplace un peu plus au Sud, tout comme les batteries.
Les soirées sont bien lugubres car le ciel rougeoie des incendies allumés par les obus ennemis à Sommauthe et Saint Pierremont.

La relève officielle a lieu le 26 mai à 6 h. Comme c’est une nouvelle ligne de résistance, de nouvelles positions sont à créer : creusement de tranchées, emplacement pour les armes lourdes, pose de barbelés, définition des plans de feux, et cela, sous les tirs permanents et variés de l’artillerie ennemie guidée par l’éternel mouchard dès le lever du jour. Dans Oches, le I/36 subit un bombardement qui détruit le clocher de l’église à 9 h 15. Des journalistes américains sont reçus au PC du Lt colonel MAISSE (74° RI).

Le 27 mai après-midi, les tirs prennent le carrefour Buzancy-Sommauthe comme cible. Nos batteries répliquent par des tirs de harcèlement sur tous les accès de l’ennemi : Mont Damion – Mont du Cygne. Des patrouilles et des reconnaissances sont régulièrement organisées afin de situer les positions de l’ennemi. L’une d’elles, avec le Lt Saire (74° RI), s’égare dans les lignes allemandes, ce qui vaut 3 tués dont le Lt (son corps ne sera retrouvé, clandestinement, qu’en janvier 1941).

Le 28 mai, on observe un va et vient inhabituel de camions allemands et un ballon captif apparaît vers La Besace : prémices d’une attaque ? Des chars FT 18 sont mis à la disposition du 119° RI au Bois du Four.

Le 29 mai, les aménagements s’accentuent : pose de barbelés et de mines dans le secteur du 74° RI. Les spahis viennent rechercher le canon de 25 abandonné dans la vallée de La Berlière ; Au Bois du Four, une patrouille qui poursuit un groupe ennemi tombe dans une embuscade : le sous-lieutenant de Tramont est tué.

Les lignes téléphoniques de l’artillerie posent beaucoup de problèmes car il faut sans cesse les vérifier et réparer les coupures. Or celles de la 15° Batterie ont 1 km de long! Et les tirs sont fréquents ! La 8° Batterie du 23° RAC bénéficie de postes de radio ER 22 à compter du 27 mai.

Le 30 mai, des coups de main ennemis se produisent en plusieurs endroits : ils cherchent à repérer les emplacements de nos armes lourdes. Mais la ficelle est un peu grosse et nos soldats les accueillent à coups de fusil. 3 chars FT 18 (vétustes) sont mis à disposition du 74° RI.

La nuit, le II/119° RI est relevé par le 36° RI. Le 31 mai, Isly subit un important bombardement. L’artillerie se manifeste fréquemment, de jour comme de nuit. Un obus tombe sur la popote du 74° à la ferme Bellevue, tuant le cuisinier et faisant 4 blessés. Des tentatives de reconnaissance ennemies ont lieu en divers endroits : elles sont toutes refoulées.

Du 1er au 7 juin, les journées se passent dans un calme relatif, avec des activités qui se répètent : amélioration des positions, organisation de coups de main pour ramener des prisonniers et avoir des renseignements, attaques allemandes répétées en divers endroits pour découvrir nos positions, activité continue des deux artilleries pour semer l’insécurité :
– 800 mines antichars sont posées devant Oches,
– La 10° Cie du 36° RI découvre un Lieutenant allemand tué, resté sur place, avec sa sacoche contenant les plans de leurs installations – les papiers d’un soldat indiquent 187° Bat d’Einsatz. Est-ce du renfort ?
– destruction du poste de secours du II/119° RI, d’une camionnette de ravitaillement (1 tué-2 blessés), dégâts aux services sanitaires à Vaux en Dieulet (21 blessés),
– Un blessé allemand du 118° IR, blessé à la Polka, se suicide quand on veut le ramasser.

Le Lt-colonel Maisse commandant le 74° RI, malade, est évacué. Une vague de bombardiers passe vers 18 h se dirigeant vers le sud. Le 7, en forêt de Sommauthe, au début de la nuit, nos soldats entendent soudain des voix allemandes qui les appellent à cesser le combat, à faire comme les Belges ; puis c’est un phonographe qui diffuse la chanson « Parlez-moi d’amour »…devant la 2° Compagnie du 119° RI. Un coup de mortier de 60 arrête cette fantaisie en une minute.

Le 7 juin, l’ennemi multiplie les attaques : sur Oches (I/36° RI), sur le secteur Oches-Sommauthe ainsi qu’en lisière Sud du bois de Sommauthe et au Bois des Murets. Partout il se heurte à une résistance bien organisée et efficace.

Le 8 juin, l’ennemi reprend ses attaques avec de plus en plus d’ardeur. Devant le Bois du Four, le I/119° met rapidement en action VB et mortiers ; l’artillerie entre en jeu. Les cris de douleur qui parviennent montrent l’efficacité de la réaction. Les FM et les mitrailleuses poursuivent les plus acharnés : c’est un véritable enfer pendant 10 mn. L’ennemi se retire alors totalement mais l’artillerie dirige aussitôt ses tirs sur les positions françaises. Les mêmes attaques surviennent au Bois de Sommauthe et sont aussi nettement repoussées.

Une forte attaque est annoncée pour le lendemain : l’artillerie française déclenche des tirs variés : d’arrêt, de neutralisation, de contre-préparation, sur le secteur Stonne-La Berlière, atteignant plusieurs convois venant vers Oches.
Est-ce le remplacement du général Huntziger par Freydenberg qui entraîne tant d’ordres et de contre-ordres côté français ? c’est en tout cas mal vécu !

47mmif7 canon antichar 47 mm modele 1937

Le 9 juin, c’est l’attaque générale, puissante, massive
On s’attend à une attaque : à 3h30 du matin, la section franche du Capitaine Plou (2° Compagnie du 36°RI) va récupérer deux canons de 25 intacts près du ruisseau, entre Oches et La Berlière. Retour une heure après, mission accomplie.
Au lever du jour débute un intense bombardement sur Oches, avec des calibres variés. Il dure 1h 1/2 et dégage une fumée intense. Puis les tirs ratissent les crêtes de Saint Pierremont alors que les vagues d’infanterie montent partout à l’assaut. L’ennemi s’infiltre dans les vergers des alentours du village.
A 5 h, les tirs de barrage demandés à l’artillerie déversent un déluge d’obus sur les assaillants. Les pertes s’accumulent mais les renforts suivent.
Devant Oches, entre les chemins de Verrières et de Sy, la section Frouard doit se défendre à la grenade.
Sur le haut du village, près de l’église, les Français sont débordés et contraints au repli malgré l’acharnement des défenseurs : le lieutenant Esnée, blessé, continue de se défendre mais il se fait hacher sur place par un tir de mitraillette. Les tirs des mitrailleuses bloquent l’avance ennemie.
A 6 h, près de la Polka, des vagues surgissant d’un profond vallon (36° ID) surprennent la 7° Cie du 74° RI qui organise bien vite la résistance avec VB, mitrailleuses et grenades. La section la plus à gauche est encerclée et faite prisonnière mais les autres tiennent bon. La ferme d’Isly, avec ses défenseurs, est devenue un immense brasier. Des tirs de mortier abattent les murs de la Polka, détruisant ainsi des positions avantageuses.

Au Bois du Four, le II/119° RI attaque un poste ennemi avancé à 500 m de la corne Est. Appuyés par les tirs de l’artillerie, des mortiers de 80 et de 60, ainsi que par le feu des mitrailleuses, il oblige l’ennemi à reculer.

A 10 heures, à la Polka, un nouvel assaut est stoppé par les feux croisés des mitrailleuses et des mortiers (1 000 obus !). Un calme relatif règne à midi.
Le lieutenant-colonel Maisse, commandant le 74° RI, malade, doit être évacué.
Une contre-attaque est tentée à 14 h par la 5° Compagnie mais sans appui d’artillerie et à découvert, malgré l’engagement de deux chars FT 18, c’est un échec.

A 17h la 1° et 3° sections du 74° subissent une ultime attaque menée par des vagues de soldats en bras de chemise et chantant. Elles sont vite bloquées par les tirs de l’artillerie.
Les tirs répétés de l’artillerie ennemie détruisent plusieurs positions de mitrailleuses sur le haut de la côte de St Pierremont. Un obus tombe en plein sur le groupe Rault faisant 6 morts et 2 blessés qui ne pourront être secourus qu’en soirée.

Les vagues qui arrivent en contournant les bois entre Oches et La Berlière sont accueillies par les feux du I/36° et du 123° RI et par l’artillerie française qui les prend pour cible et les décime.
Une contre-attaque menée par la 5° Compagnie du 36°, en réserve, appuyée par l’artillerie et les feux des mitrailleuses, dégage le village et sa partie Est. La section Frouart ramène 44 prisonniers. Une section de la 3° Compagnie, encerclée depuis le matin, est dégagée.

Tenu en échec et même obligé de reculer en plusieurs endroits, l’ennemi enregistre des pertes importantes et abandonne beaucoup de matériel. A 15 h 30 une contre-attaque de II° Bataillon sur les environs de l’église tombe sur un secteur vide : l’ennemi s’est retiré !

Vers 17 h le capitaine Plou et la 2° Compagnie réoccupent les positions de la 3° compagnie décimée. Elle fait 25 prisonniers mais Plou est blessé par un éclat de fusant. Les corps francs de la 1° Compagnie nettoient le terrain en avant de Oches et font 70 prisonniers.
Vers 19 h les observateurs du 23° RAC voient une douzaine de camions sanitaires ennemis ramasser les morts et les blessés.

Le calme revient. Les rescapés notamment ceux du groupe Rault sont enfin secourus en haut de la colline de Saint Pierremont. Des hauteurs situées entre Oches et Sy revient un groupe avec l’aspirant Comoy qui a subi les tirs des deux artilleries mais s’en est sorti.

Les 5° et 6° groupes du 223° RAC n’ont pas chômé : plus de 1 200 coups dans la journée !! plus de 8 000 tirs par l’ensemble de l’artillerie. Un prisonnier allemand parlant parfaitement le français déclare que l’artillerie française a été terrifiante et que leurs pertes sont très sévères.
Oches n’est plus qu’un amas de ruines avec quelques pans de murs ici, des caves béantes plus loin ; nombre de cadavres de chevaux et de vaches gisent un peu partout ; beaucoup de matériel abandonné, détruit, de munitions de toutes sortes, d’armes plus ou moins détruites gisant ça et là ; et il reste nombre d’animaux errants, des chevaux surtout, surgissant de partout…Le verrou de Oches a été magnifiquement défendu, mais il est réduit en un amas de pierres et de cadavres !

Les pertes françaises sont importantes : il ne reste que 6 officiers sur 18 au 1er Bataillon du 36°RI. La 3° Compagnie a été presque anéantie. Le Bataillon sera cité à l’ordre de l’armée.

A 23 h, le II/119° RI (en réserve) relève le I/36°RI

 

Source : Ardennes 1940 A ceux qui ont résisté

 

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